Bertrand Weckel
Le risque en entreprise : prévenir ou guérir ?
La vie est un long fleuve tranquille, rien ne peut nous arriver, les catastrophes ne concernent que les autres. Nous aimerions tous que cette phrase soit une réalité et pourtant… Ancien officier des sapeurs-pompiers, Bertrand Weckel a forgé sa vision du risque dans le réel et a décidé de travailler à une meilleure prévention. Parce qu’il vaut mieux anticiper le feu plutôt que de l’éteindre, Atrisc évalue le risque en entreprise et vous propose de le maîtriser.
Bonjour Bertrand, qui êtes-vous ?
Je suis Bertrand Weckel, président et Directeur Général chargé du pilotage de la société Atrisc, SAS créée en 2010 avec deux associés et spécialisée dans la gestion des risques et des situations complexes en entreprise. Nous sommes aujourd’hui 25 associés, salariés ou collaborateurs occasionnels répartis dans toute la France.
J’ai créé cette entreprise pour trois grandes raisons. La première, c’était un sujet passion autour des sujets de la société. La deuxième, c’est qu’à titre personnel, après un parcours dans la fonction publique, j’avais envie de créer quelque chose de différent, c’est le projet entrepreneurial. Enfin, la troisième, c’est que j’ai fait le constat que l’expertise, qui me vient de mon expérience en tant qu’officier des sapeurs-pompiers, était peu connue dans le monde privé. Nous étions donc les précurseurs. Aujourd’hui, notre métier est d’apporter un conseil et des solutions sur la maîtrise et la gouvernance des risques, quelle que soit leur nature, c’est-à-dire tout ce qui concerne la fiabilité des organisations, leur processus organisationnel et la communication de crise. Nous travaillons sur les aspects humains de toutes ces dimensions très managériales.
C’est quoi aujourd’hui les risques pour une entreprise ?
C’est un sujet vaste. La norme ISO 31000 résume bien la définition des risques, elle le définit comme «l’effet de l’incertitude sur l’atteinte des objectifs d’une structure». On va parler des aléas, des enjeux, des méthodes plutôt centrées sur les risques professionnels ou des probabilités et des conséquences. Ça, c’est de la méthodologie. Notre approche consiste à dire qu’il se passe des choses imprévues qui peuvent avoir des conséquences sur nos objectifs, qu’ils soient financiers, sociaux, techniques, industriels ou même extérieurs. L’approche managériale consiste à se poser les bonnes questions. Cela peut concerner des réglementations qui changent, un contrôle de l’URSSAF qui découvre quelque chose, une arnaque, les sujets sont si vastes. J’ai le cas d’un client qui vient de subir une arnaque de 300 000 € sur un compte à terme sur la base d’un virement frauduleux. L’idée est donc de se poser l’ensemble des questions qui permettent d’identifier ce qui pourrait menacer l’entreprise à un moment donné. S’en protéger devient alors une opportunité de développement. Je peux vous citer l’exemple de Coca-Cola qui utilise des plastiques. Des associations commencent à refuser de porter la flamme Olympique parce que Coca-Cola sponsorise les JO. Voilà le type de risques qui peuvent être évalués en amont. Je vous donne là l’exemple d’une très grosse société, mais nous pouvons ramener cette logique à l’échelle d’une PME-TPE. Je suis toujours surpris lorsque je vois des start-ups qui se développent et sont en pleine croissance, à qui personne ne demande de travailler sur leur évaluation des risques. Aujourd’hui, une banque qui veut financer une société en développement va lui demander un business plan, mais elle va rarement lui demander comment elle couvre ses risques ? On sait qu’une RC pro vous couvrira à hauteur de 60 % de vos risques. Depuis 2011, nous faisons de l’appui en situation de crise : à chaque fois, il s’agissait de risques partiellement ou non couverts par les contrats d’assurance. Nous opérons donc auprès de nos clients avec une vision 360°.
Un autre exemple très simple concerne les sociétés qui ne réalisent pas leur Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels (DUERP). Ce dernier est obligatoire. Près de 50 % des sociétés ne l’ont pas fait. Si demain ces entreprises se retrouvent en situation d’accident du travail grave, l’inspection du travail va leur demander ce document et là, si le DUERP n’existe pas ou n’est pas un outil de pilotage dans l’entreprise, le risque devient pénal pour le dirigeant. Certes, c’est une contrainte réglementaire, mais au-delà de ça, c’est l’engagement d’un risque personnel pour le dirigeant ou la dirigeante qui est très fort. Ce n’est pas tout de connaître le risque, ce document met en reflet les actions menées par l’entreprise pour se prémunir de ces risques, et c’est en ça qu’il est important. Malheureusement, très souvent, il est considéré comme une simple formalité administrative. Aujourd’hui, les statistiques nous montrent que les français sont les plus mauvais élèves Européens sur le sujet du nombre de décès dans le monde du travail, ça devient inquiétant. Ce sont des risques importants qu’un dirigeant ne prendrait pas dans d’autres domaines. Je constate souvent une forme d’aversion ou de déni face aux risques, comme si cela ne pouvait pas arriver ou n’arrivait qu’aux autres. Il y a quand même tous les jours des gens qui pensaient que ça ne leur arriverait pas.
Connaître les risques liés à son entreprise, c’est en prendre conscience. À partir de là, on agit ou pas. Il ne s’agit pas de dire, je ne le traite pas parce que je ne veux pas m’y intéresser, mais, je ne le traite pas, car ce n’est pas nécessairement dans mes priorités ou dans mes moyens du moment, mais je sais que c’est là. Ce n’est pas du tout la même approche que le déni.
Nous avons, dernièrement, accompagné une société qui souhaitait une approche de matrice des risques, ils étaient en train de vendre. Nous avons découvert que leur principal risque était organisationnel et lié à la conduite du changement qu’ils étaient en train d’opérer : vendre la société. Ils souhaitaient que les effectifs soient maintenus par l’acheteur. Cela signifie que le risque peut toucher l’ADN même de l’entreprise.
Il y a aussi les risques liés à l’évolution ou la croissance, je vous donne un exemple : vous construisez un beau bâtiment dans un établissement recevant du public, vous ajoutez de la superficie. L’architecte ne vous prévient pas ou ne sait simplement pas qu’en rajoutant 200 m², vous allez passer un seuil qui va modifier votre classement et occasionner des exigences qui vont nous coûter très cher et peut-être même impacter la rentabilité de l’entreprise. Vous rencontrez le même problème quand une entreprise ne voit pas qu’elle devient une Installation Classée pour La Protection de l’Environnement . La sécurité a un coût et quand elle devient réglementaire, vous n’avez plus le choix.
De quelle manière évaluez-vous le risque en entreprise ?
Nous avons élaboré une méthode qui s’appuie sur notre propre matrice d’analyse des risques. Nous allons alors les séparer en fonction de l’activité par grands piliers, les volets organisationnels, les volets humains, les aspects techniques et l’aspect de la réglementation. Nous avons ensuite un ensemble de questions très larges. Par exemple, avez-vous un contrat d’assurance sur ce sujet ? Que dit-il réellement ? Savez-vous l’activer ? Il y a un premier risque lié aux assurances auquel on pense rarement, c’est que dans tous nos contrats personnels et professionnels, il y a une première mention au début qui dit que nous sommes couverts si nous respectons la réglementation. Par exemple, s’il y a mort d’homme, il y a enquête, ce qui signifie la venue d’un expert. Que va-t-il faire ? Il va commencer par vérifier si l’entreprise dispose d’un registre de sécurité, d’un document d’évaluation des risques professionnels, si les organismes de contrôle sont passés. Ce sont les questions que va poser l’expert. Nous préférons les poser avant le drame. La seule possession de ce document ne suffit pas. Lorsque je vois un DUERP qui date de 2018, qui n’a pas évolué, je constate qu’il n’y a pas de suivi, que les actions n’ont pas été mises en place. Les inspecteurs du travail feront le même diagnostic que moi. Identifier les risques, si on ne fait rien derrière ne sert à rien. Avoir conscience de ces risques ne protégera pas le dirigeant. Ce sont les actions mises en place qui le protégeront. Encore une fois, on parle de risque pénal et de risque de survie pour l’entreprise.
Une fois qu’on a identifié les risques d’une entreprise, quelles sont les solutions ?
Il y a tout d’abord la formation, et sur ce sujet, nos privilégions l’appropriation de la maîtrise des risques internes, afin de rendre les structures autonomes sur un maximum de sujets. Ensuite, il y a l’engagement sur de l’action, c’est-à-dire avoir des plans d’action et selon la taille de la structure, nous avons souvent un intérêt à rester présents sur le long terme, ne serait-ce que pour un rappel à l’ordre des objectifs. Nous intervenons donc en temps partagé externe.
Ensuite, nous cherchons à transformer ces exigences en opportunités. C’est-à-dire qu’une entreprise qui met une vraie politique de maîtrise des risques en place peut commencer à négocier ses contrats d’assurances. Nous sensibilisons parfois nos clients sur le fait de devenir leur propre assurance, par exemple pour un bâtiment pour lequel les exigences de l’assureur sont trop fortes au regard des enjeux. Ce sont de vrais leviers de négociation. L’un des gros enjeux des sociétés est d’accepter ou de s’engager dans des démarches de continuité d’activité. De plus en plus d’assureurs commencent à exiger ce type d’engagements, y compris sur des petites PME. Or, le préalable à une démarche de continuité d’activité, c’est de faire l’analyse du risque, la cartographie des risques auxquels l’entreprise est confrontée.
On met en avant, dans les offres commerciales, les démarches environnementales RSE. Pourquoi ne pas faire la même chose avec des démarches de protection des salariés ? Par exemple, nous avons une voiture électrique dans la société, mais paradoxalement, ce n’est même pas pour l’environnement. Ce qui m’intéresse, c’est que la personne ne roulera pas plus de deux heures, elle est obligée de s’arrêter. Si vous analysez le DUERP d’ATRISC, hormis les risques psychosociaux, gestes et postures, le principal risque est lié au déplacement. Tout ça pour dire que la maîtrise des risques peut devenir un levier de valorisation de l’entreprise.
Le risque zéro existe-t-il ?
Non, bien sûr que non. Le risque existe pour nous tous, il faut l’accepter, il fait partie de la vie. L’idée, ce n’est pas d’arriver au risque zéro, mais d’évaluer les risques potentiels importants auxquels nous pouvons être confrontés et de mettre en place ce qu’il faut qu’on se prémunir. Il y a une petite phrase qui dit «protège-toi de toi-même». Le vrai enjeu pour les dirigeants est de se protéger d’eux-mêmes. Le sentiment que ça ne peut pas arriver, que cela concerne les autres, que l’entreprise saura gérer, toutes ces idées poussent parfois le dirigeant à être dans le déni. Se protéger du risque ne signifie pas tomber dans la paranoïa, mais cela signifie faire preuve de bon sens et prioriser les risques selon leur probabilité et l’impact qu’ils peuvent avoir sur notre société.
Un de nos services clés, l’abonnement Sérénité H24, devient ici essentiel pour toute organisation : nous aidons les dirigeants confrontés à des situations exceptionnelles et complexes 7 jours 7, 24h sur 24. Et je peux vous dire que nous avons vécu avec nos clients des situations bien difficiles qui parfois se sont transformeés en belles histoires…
Bertrand Weckel
Atrisc
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