Gauthier Douchet, Fabien Hazebroucq : Trinaps

Un duo connecté en haut débit

Gauthier et Fabien ne se quittent plus depuis leurs études. Leur relation a débuté avec la fibre musicale et se poursuit avec la fibre optique. Open est allé à la rencontre de cette association chimiquement complémentaire pour découvrir un duo avant-gardiste qui a compris Internet avant les autres et qui a fondé Trinaps, une «petite» qui a tout d’une grande, la proximité en plus.

Gauthier Douchet (GD), Fabien Hazebroucq (FH) bonjour, qui êtes-vous ?

GD : Nous ne sommes pas originaires de la région, je suis ardennais et Fabien est picard. Je suis arrivé en 2000 après mon bac et j’ai intégré l’UTBM de Belfort où j’ai rencontré Fabien. Ça nous a apporté un background technique et la projection de travailler ensemble, d’abord sur des projets collaboratifs par le biais de la vie associative. À ce moment, nous étions 3 associés, aspirant à réaliser un projet autour du wifi et du machine to machine qui était l’ancêtre de l’IoT.

FH : Encore étudiants, nous sommes finalement partis de rien et nous avons décidé de miser sur des technologies innovantes telles que la téléphonie IP, à l’heure où le téléphone était encore analogique, le déploiement du wifi ou de la fibre optique. À ce moment-là, ça ne parlait pas à grand monde.

GD : Nous avons poursuivi les projets associatifs, mais avec une plus grande ampleur et en 2007, nous avons créé Trinaps, en passant par l’incubateur d’entreprises innovantes de Franche-Comté. Fabien était mon stagiaire. Ce qui est drôle, c’est que nous avons débuté notre carrière dans notre propre entreprise, hormis pour des stages et jobs d’été.

FH : C’est la motivation qui a fait notre succès, ainsi que notre complémentarité. Gauthier est spécialisé sur la partie télécom, et moi, sur la partie gestion de process. Nous avons également eu raison de miser sur des technos qui se sont imposées comme des standards. Cela nous a conduit à avoir notre premier contrat sur le site de Technom à Belfort, qui était une des premières zones d’activité à installer la fibre que nous avons gérée avec des offres mutualisées pour les PME. L’idée était de proposer des solutions sur mesure et de répondre à des besoins spécifiques.

GD : Investir sur un datacenter, avec des systèmes de redondance électrique, de climatisation, de la biométrie, un groupe électrogène et de l’extinction d’incendie, c’est un investissement colossal. Nous avons décidé de le faire et de le mutualiser avec un accès 24h/24 pour les entreprises. Et aujourd’hui, nous sommes 32 personnes chez Trinaps, réparties principalement sur 2 sites et un déploiement Alsace-Bourgogne-Franche-Comté.

Quelles sont les forces d’un opérateur local face aux géants des télécoms ?

GD : Notre force, c’est la proximité, c’est d’être en mesure d’apporter une réponse rapide à nos clients. Dans la chaîne de valeur des télécoms pro, il y a trois niveaux, il y a les opérateurs d’infrastructure qui vont déployer du réseau, c’est-à-dire qu’ils creusent des tranchées pour passer le câble de fibre optique. Leurs clients sont des opérateurs de service qui vont amener le service sur ce câble nu. Puis, il y a le client final, c’est-à-dire l’entreprise ou la collectivité. Trinaps a le double métier d’opérateur d’infrastructure et de service. Pour cela, nous avons tiré notre propre réseau de fibre et surtout une parfaite connaissance du terrain, ce qui nous permet d’être en mesure de mobiliser à la fois notre réseau et celui d’un autre opérateur d’infrastructure.

FH : Il est évident que ce service de proximité a un impact sur le prix et nous ne sommes pas les moins chers sur les services de base, mais nous pratiquons un prix qui est juste, lorsqu’on prend en compte la qualité du service que nous proposons, ainsi que notre réactivité. Lorsque nos clients appellent parce qu’ils rencontrent un problème, ils ont directement un technicien en ligne. Il n’est pas ballotté durant des heures sur une hotline qui se trouve dans un autre pays. Notre entreprise est très petite dans notre domaine d’activité, par rapport aux géants du marché. Pourtant, nous investissons en permanence pour rester à la pointe, que ce soit sur le plan matériel ou humain. La proximité est aussi dans la rapidité des prises de décision. Lorsque nos clients rencontrent un problème critique, les informations remontent immédiatement vers Gauthier et moi.

GD : En résumé, Trinaps s’occupe de la connectivité, de l’accès internet ou interconnexion de site, de la téléphonie fixe et mobile, du cloud et donc, des solutions de cyber-sécurité, principalement pour ce qui concerne notre processus. C’est cette adaptabilité qui fait la force de notre petite structure. Nos processus sont certifiés ISO 27001 qui est la référence en sécurité des systèmes d’information. Enfin, il y a un dernier aspect de la proximité qui est important pour nous, c’est l’implication dans le tissu économique et sociétal. Nous nous engageons auprès de nombreux réseaux tels que le réseau Entreprendre. Nous agissons également en tant que mécènes, par exemple pour des salles de musique ou des festivals, des sujets qui nous touchent beaucoup. Nous parrainons également l’école de Commerce de Belfort, l’ESTA, et proposons régulièrement à des étudiants de venir visiter le datacenter. Nous souhaitons être ancrés dans la cité, être un acteur local sur tous les plans. C’est la façon dont nous envisageons l’entreprise.

Vous avez un projet de déploiement de la Fibre optique en Alsace, pouvez-vous nous en parler ?

GD : Ce projet se traduit par un co-investissement avec 4 autres opérateurs sur une dorsale fibre de Belfort à Strasbourg, qui fait 250 km. En fait la fibre optique, c’est un cheveu et chaque opérateur va avoir un certain nombre de brins de fibre sur lequel il sera autonome. C’est un enjeu énorme pour nous qui souhaitons apporter une autoroute numérique supplémentaire par rapport à ce qui existe déjà et parce qu’il n’y a pas tant d’opérateurs qui ont connecté la plaine alsacienne. Nous souhaitons développer des points de présence, qui sont les centres névralgiques de la fibre, entre Belfort, Mulhouse, Colmar et Strasbourg, et à partir de là, nous désirons irriguer toutes les zones d’activité, en les raccordant avec notre propre réseau de fibre. Nous maîtriserons alors le tuyau de A à Z, ce qui nous permettra de fournir les services appropriés sur ce tuyau.

FH : Cela permettra également d’accroître la rapidité des transmissions. Avec les réseaux actuels, une entreprise qui a plusieurs sites en Alsace doit passer par un prestataire local qui remonte parfois à Paris, voire à l’étranger, puis redescend. Ce sont des escales inutiles. Ce que nous proposons, c’est une connexion directe.

Trinaps développe également une expertise dans la mise à disposition de wifi sur des gros événements ou de grandes scènes. Pouvez-vous nous expliquer ?

GD : Avant même la création de la société, Fabien et moi travaillions pour les Eurokéennes et pour le FIMU (Festival de Musique Universitaire). Nous installions des ordinateurs, nous faisions un peu d’informatique. Lorsque nous avons créé la société, nous nous sommes aperçus que les besoins de déploiement de wifi étaient très importants et que nos connaissances pouvaient nous servir dans le cadre de l’événementiel. Nous avons débuté en 2008 avec les Eurockéennes de Belfort, qui est la grande référence locale et avec laquelle nous avons grandit. Au départ, il y avait 2 accès ADSL que nous répartissions avec des petits câbles, des ponts wifi, etc. Il y avait peu de besoins, mais aujourd’hui, c’est très différent. Il y avait au départ des besoins pour l’organisation et la direction technique, puis pour la presse et ensuite les artistes, et finalement aujourd’hui, pour le public qui est devenu hyper connecté. Aujourd’hui, sur les Eurockéennes, il doit y avoir 60 bornes wifi qui sont déployées, avec 45 points réseau et environ 5 km de fibre optique et autant de RJ45, c’est devenu une petite ville. Depuis l’année dernière, nous travaillons également avec la Foire aux Vins de Colmar pour qui nous avons refait toute l’installation wifi plus la partie événementielle. Ce qui est amusant, c’est qu’à l’époque, on nous voyait comme les petits informaticiens qui bricolaient leur petit truc. Aujourd’hui, sans solutions IT, un événement ne tourne simplement plus. Tout le contrôle de la billetterie nécessite une connexion wifi, idem pour le cashless, il n’y a plus de flux d’argent, tout passe par un bracelet qui est scanné par un pad qui a besoin de wifi. Et là, je ne parle même pas des retransmissions en direct, par exemple avec Arte Live ou les diffusions radio.

Aujourd’hui vous gérez énormément de data en local, quels sont les enjeux autour de la maîtrise des données ?

FH : L’enjeu principal, c’est la survie de l’entreprise. La menace cyber est devenue le risque numéro 1 pour les entreprises et les collectivités. Nous voyons tous les jours des mairies et des hôpitaux qui se font attaquer et ne peuvent plus travailler. Notre enjeu est de protéger et de garantir la pérennité de l’entreprise. C’est un sujet stratégique qui dépasse le cadre de l’antivirus. Les données sont devenues un actif de l’entreprise au même titre que l’usine ou les outils de production. Il y a la protection des données, mais également du processus, comme par exemple l’ERP qui, s’il n’est plus accessible, met à mal le fonctionnement de l’entreprise. Il y a encore peu de temps, les grosses entreprises étaient principalement ciblées. Aujourd’hui, quiconque est sur Internet devient une cible. Le hacking fonctionne comme la pêche, il y a la pêche au gros où on va cibler une entreprise précise et il y a le chalutier qui va déposer son filet et tout ce qui passe dedans sera touché. Les plus faibles sont les plus susceptibles de se faire avoir. L’intention d’une attaque cyber est financière et peut concerner du vol de données, de l’espionnage industriel, du blocage ou même du sabotage. Une minorité peut être à but idéologique. N’importe qui peut trouver le kit du parfait hacker sur le dark web, mais les menaces sont souvent orchestrées par des entreprises ou des organisations.

Quelles sont les réponses aujourd’hui ?

FH : Les réponses techniques ne sont plus suffisantes. Bien entendu, les firewalls et antivirus sont la base, mais si ce n’est pas accompagné d’une sensibilisation et de formation, le risque reste présent. La majorité des attaques viennent d’un problème humain. Cela peut être quelqu’un qui a cliqué sur un lien ou qui a ouvert une pièce jointe sur une clé USB, sans faire attention.

GD : Nous proposons ces sensibilisations aux entreprises, en plus de toutes nos solutions techniques. Il faut bien comprendre qu’il y aura toujours une faille, quoi qu’on fasse. Le datacenter est un coffre-fort qui doit communiquer dans les deux sens, des informations qui entrent et d’autres qui sortent. À partir de ce moment, il y a un risque de faille technique ou humaine. Cela peut également venir d’un client ou d’un fournisseur. Former ses équipes et les sensibiliser réduit ce risque humain, mais le risque 0 n’existe pas.

FH : Concernant les entreprises, les grands donneurs d’ordres vont être très regardants sur ces aspects auprès de leurs prestataires. Une entreprise qui fait le choix de négliger sa protection prend le risque de perdre certains marchés, car elle n’engage pas que sa sécurité, mais également celle de ses clients.

Aujourd’hui, la souveraineté des données est un véritable débat, entre les divers scandales qui ont secoué le monde du numérique et la situation géopolitique, est-ce une raison valable de stocker ses datas en France ?

GD : Absolument ! Aujourd’hui, l’hébergement de données de santé se fait chez Microsoft via le Health Data Hub, c’est scandaleux. Nous ne rivalisons bien entendu pas avec ces géants en termes d’infrastructures, mais nous attachons une importance particulière à apporter une réponse à notre échelle. Cette réponse, c’est Extendo, c’est de reprendre la maîtrise sur nos données, savoir où elles sont, qui les gère et savoir si je peux les récupérer en cas de problème. Il y a un point essentiel sur la question des Data, c’est le droit. Lorsque vous devez porter plainte contre un acteur américain, vous tombez sur le droit américain qui est en complète opposition avec le RGPD européen, et c’est un véritable problème. Lorsque vous déposez vos données, qu’elles soient personnelles, professionnelles ou même sensibles sur un système de cloud à l’étranger, vous prenez un risque. Beaucoup d’hébergeurs de données sont flous sur les conditions de détention de vos datas. Notre datacenter est chez nous, à Belfort, certifié Hébergeur de Données de Santé et on peut le visiter. Voilà la promesse que nous faisons à nos clients.

 

Gauthier Douchet
Fabien Hazebroucq
Trinaps

11 rue Sophie Germain
90000 Belfort

30 rue François Spoerry
68100 Mulhouse

contact@trinaps.com
+33 3 39 03 40 40
trinaps.com

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